Sorcellerie décryptée

Bonsoir, aujourd'hui, présentation d'un essai d'ethnologie sur un sujet porteur de multiples fantasmes : la sorcellerie dans le monde actuel. Au-delà des clichés des vieilles femmes et vieux messieurs à chats, balais, longues barbes et chevelures blanches, qui sont réellement les sorciers contemporains et comment ces drôle d'individus pratiquent-ils leur art en France ? Les mots, la mort, les sorts de Jeanne Favret-Saada, publié en 1977, dresse un premier aperçu instructif de ce domaine après une enquête approfondi dans une communauté rurale.
L'autrice a débuté son enquête en 1969 dans le bocage mayennais, ses investigations lui ont pris plusieurs années et l'ont amenée à des conclusions qu'elle ne soupçonnait pas. L'essentiel de la sorcellerie ne réside pas tant dans la confection de charmes, rites et potions magiques - même si ces pratiques existent - que dans la relation d'emprise qui se noue entre un ensorceleur et sa victime. Personne ne parle ouvertement de magie, de peur de passer pour crédule ou simplet, mais lorsqu'une succession de malheurs s'abat sur une même personne, le doute n'est plus permis, il s'agit d'un sortilège. Par la parole, la simple présence physique, quelques gestes, et tout un ensemble de petits faits, imperceptibles aux profanes, les sorciers, en grands manipulateurs, terrorisent et poussent au malheur les proies désignées des forces occultes qui les habitent. Seul un désorceleur, c'est-à-dire une personne investie d'un pouvoir équivalent à celui de l'agresseur, et décidée à s'en servir pour protéger les victimes, peut venir à bout d'un sorcier. L'autrice elle-même fut prise par certains de ses interlocuteurs pour une sorcière, tant son intérêt pour le sujet la plaçait en position suspecte dans cet univers secret, aux frontières mouvantes, empli de violence et de mystère qu'il lui fallait rationaliser. Difficile de restituer un résumé pertinent de cette étude, entre promenade anthropologique, essai de psychologie et incursion en terre de rêves et de cauchemars, je conseille cette lecture troublante à tous les curieux dès le lycée.
Where I Rest par Audrey Kawasaki (2011)
Terminons sur un extrait de Fantasia, "L'apprenti sorcier" de Paul Dukas, à bientôt !

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